Shaka Zulu, fondateur au 19ème siècle du royaume zoulou en Afrique australe, est l’un des plus fameux conquérants de l’histoire africaine.

🔴Les origines de Shaka Zulu

Shaka, naît dans les années vers 1780 dans l’est de l’actuelle Afrique du Sud. Il est le fils de Senzangakhona, chef des Zoulous et de Nandi, une princesse langeni.

Les Zoulous et Langeni sont alors deux petits clans appartenant au peuple nguni. Sa Ce dernier se compose notamment d’autres populations comme les Xhosa, les Swazi ou les Ndebele d’Afrique australe.

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Le jeune Shaka passe une partie de sa jeunesse chez les Langeni dans la famille de sa mère.

A cette époque, les Zoulous paient tribut aux Mthethwa, une autre population bien plus puissante.

🔴LA PÉRIODE MTHETHWA
Shaka entre en conflit avec son cousin Makhedama alors au pouvoir chez les Langeni. Jeune homme, il se réfugie chez les Mthethwa dans les années 1800. Il passe vraisemblablement une dizaine d’années sous l’égide de Dingiswayo, un guerrier qui règne sur les Mthethwa. Il y développe de grandes qualités guerrières et politiques, devenant l’un des bras droits de Dingiswayo.

🔴LA PRISE DU POUVOIR CHEZ LES ZOULOUS
Bientôt, Senzangakhona décède. C’est son fils Siguijana, un demi-frère de Shaka, qui prend le pouvoir. Peu après, vers 1810, Shaka, à la tête d’une armée mthethwa et avec l’appui d’une partie des dignitaires locaux, prend le pouvoir du clan zoulou. Sigujana est tué à l’occasion. Shaka continue à être subordonné à Dingiswayo.

🔴FACE À LA MENACE NDWANDWE
Vers 1812, la grande puissance de la sous-région, les Ndwandwe attaquent les Mthethwa, les Zoulous et les autres populations à leur nord. Quelques années plus tard, Dingiswayo est tué dans un conflit avec les Ndwandwe. Le royaume mthethwa se désintègre alors. Shaka en profite. Il fait assassiner l’héritier de Dingiswayo et s’approprie au mieux les restes de son territoire vacant.

🔴Les débuts du royaume zoulou

Vers 1819, les armées de Shaka défont celles de Zwide, le souverain des Ndwandwe. Au sud, il s’allie avec d’autres populations comme les Qwabe, dont il combine le territoire au sien. C’est là qu’il bâtit sa ‘capitale’, KwaBulawayo. Entre alliances et conquêtes, il établit son royaume dont le coeur d’environ 100 km s’étendra de Nhlazatshe au nord à KwaBulawayo, sa capitale, au sud vers 1824. Les dernières années sont difficiles pour Shaka. Les ressources sont en effet rares. Elles le poussent à effectuer des raids de longue distance et des campagnes militaires. L’une d’entre elles était dirigée contre les Ndandwe qu’il vainc. Il parvient à en écarter définitivement la menace. En 1825, Shaka vint à neutraliser un autre groupe, celui des Chunu.

🔴LA FIN DU RÈGNE
En 1827, Nandi, la mère de Shaka meurt. Nombre de récits ont présenté sa mort comme ayant donné lieu à un gigantesque massacre de la part de Shaka. Ils sont probablement exagérés voire inventés. Cette année aussi, Shaka déplace sa résidence à kwaDukuza. Ce déplacement plus au sud est peut-être du aux aspirations de Shaka à commercer avec les Européens présents au Cap. Il cherche à en obtenir notamment des armes à feu. Il utilise aussi des Européens dans ses raids et campagnes. En septembre 1828, Dingane et Mhlangana assassinent Shaka à KwaDukuza.

🔴SHAKA, LE GUERRIER
Shaka est souvent présenté comme un génie militaire. La constitution rapide de son royaume a beaucoup impressionné. L’une de ses formations militaires la plus connue est celle des cornes de buffle. Il en serait l’inventeur. Cette formation divise l’armée en trois sections. Les deux cornes se composent de jeunes soldats relativement inexpérimentés qui vont prendre en tenaille l’ennemi. Face à celui-ci se trouve le ‘crâne’, composé des meilleurs éléments de l’armée et qui dans l’idéal sert à porter le coup de grâce. La poitrine est composée des guerriers les plus anciens, qui ne servent qu’en dernier recours.

🔴 QUAND LES ZULUS ONT VAINCUS L’EMPIRE BRITANNIQUE

En janvier 1879, l’armée britannique en Afrique du Sud envahit le royaume zoulou indépendant et auparavant ami, qui avait été fondé par le redoutable guerrier Nguni Shaka Zulu en 1818. Shaka avait été le premier véritable roi d’Afrique du Sud, en ce sens qu’il avait réussi à unir près de 800 clans Nguni-Bantous de l’Est sous son règne, déplaçant le reste. Il a également été le premier à établir une véritable armée, qu’il a divisée en régiments appelés impis armés de sagaies et d’iklwas – le premier une lance traditionnelle à longue perche à utiliser à distance, le second une version remodelée à courte perche qui était mortelle dans combat au corps à corps.

À la tête des troupes britanniques se trouvait Lord Chelmsford, un Chevalier Commandeur de l’Ordre du Bain qui avait déjà combattu en Crimée, en Inde et en Afrique du Sud, remportant des escarmouches avec des chefs Xhosa qui ont sans aucun doute influencé sa mauvaise opinion des Zoulous. Il commandait 4 700 soldats hautement qualifiés équipés des derniers fusils Martini-Henry, assistés de volontaires coloniaux armés et de nombreux canons de campagne de la Royal Artillery. Il a attaqué le royaume sur trois fronts, s’attendant à une victoire facile et à une renommée nationale.
Face à lui, dans la vaste plaine brûlante d’Isandlwana, se trouvait une armée zoulou de 350 000 guerriers brandissant des lances mortelles et un assortiment d’anciennes armes à feu à chargement par la bouche, divisée en 34 régiments dont 18 étaient composés d’hommes mariés et 16 de célibataires. . Cependant, comme 7 des régiments mariés étaient composés d’hommes de plus de 60 ans, il n’y avait que 27 régiments zoulous aptes à prendre le terrain, soit quelque 44 000 guerriers.

La nouvelle de la force d’attaque parvint à la cour zouloue alors qu’elle s’apprêtait à accueillir le festival annuel des premiers fruits, auquel assistaient tous les régiments, les petits chefs et les meilleurs isangomas du pays – qui commencèrent immédiatement à fabriquer des amulettes protectrices et des potions revigorantes. Ce qui devait être une fête des récoltes s’est transformé en une cérémonie d’avant-guerre de trois jours, à l’issue de laquelle tous les guerriers ont été aspergés de médicaments protecteurs et envoyés à la frontière.

Lorsque les Zoulous sont apparus pour la première fois au loin, Lord Chelmsford a divisé ses forces pour les rencontrer, laissant plus de 1 500 hommes dans le camp principal sous la colline d’Isandlwana. C’est cette force de réserve que les Zoulous ont attaquée, laissant le régiment principal de Chelmsford bloqué à des kilomètres et incapable d’aider.

Le plan zoulou était simple, mais efficace, développé sur des centaines d’années tout en chassant de grands troupeaux de gibier. On l’appelait les « cornes du taureau », avec les cornes faites de régiments plus jeunes et rapides dont le travail principal était d’encercler l’ennemi, laissant le massacre aux guerriers les plus aguerris qui supporteraient le poids d’une attaque frontale.
La tactique réussissait le mieux si les deux cornes terminaient l’encerclement de l’ennemi avant que le corps principal des guerriers n’ait été vu, et dans cette bataille, ils encerclèrent non seulement la position britannique mais aussi la colline d’Isandlwana elle-même. Lorsque le cercle a été fermé, ils ont avancé à une vitesse de jogging constante, puis se sont mis à courir.

La bataille a fait rage pendant moins d’une heure, à la fin de laquelle tous les hommes britanniques sauf 100 avaient été tués – et c’est parce qu’ils se sont enfuis avant que les Zoulous n’attaquent. Lorsque Lord Chelmsford est entré dans le camp dévasté jonché de cadavres, il a dit : « Mais j’ai laissé une force puissante ici ! Comment était-ce possible ?

Ce fut la pire défaite jamais subie par les troupes britanniques aux mains d’indigènes équipés d’une technologie militaire largement inférieure. C’était aussi la plus grande victoire que les Zoulous aient jamais remportée.

🔴SHAKA ZULU, ENTRE HOMME ET MYTHE
L’image qui nous est aujourd’hui laissée de Shaka est complexe et contradictoire. Des écrivains africains post-coloniaux en ont fait un génie militaire modèle.

🔴LES RACINES D’UNE DIABOLISATION
Son successeur, Dingane, a vraisemblablement contribué à déformer son image en le présentant comme une personne immorale et illégitime à régner. Propager de telles rumeurs justifierait a posteriori l’assassinat de son propre frère.

C’est aussi le cas d’une vision selon laquelle Shaka Zulu serait un enfant illégitime et aurait fait ouvrir le ventre d’une femme enceinte pour en voir le foetus. On retrouve ce genre de calomnies dans la réécriture de l’histoire de souverains par leurs successeurs. C’est par exemple le cas d’Adandozan de Dahomey vis-à-vis de Ghezo et de Soumaoro Kanté vis-à-vis de Soundjata Keita.

C’est aussi le cas de témoins britanniques. L’un d’entre eux, Henry Francis Fynn a présenté Shaka comme un génocidaire. Selon cet auteur, Shaka Zulu aurait fait tuer un million de personnes. Ce type de propos est toujours relayé de nos jours, y compris par des Africains. Pourtant, de nombreuses preuves suggèrent qu’il s’agit en fait de propos mensongers.

Dans une lettre destinée à Fynn, un autre Britannique, Nathaniel Isaacs, lui fait une demande spécifique:

« Ecoute, tu es sur le point de publier. Présente Shaka comme un être aussi sanguinaire que possible. Cela donnera du piquant au livre et aidera à le rendre intéressant ».

Isaacs et Fynn souhaitaient certes transmettre un récit croustillant d’une Afrique sauvage à ses lecteurs britanniques.Toutefois, ils souhaitaient surtout obtenir un terrain de la part du gouvernement colonial britannique en Afrique du Sud. Ce terrain était autrefois la possession de Shaka. Présenter ce dernier comme un génocidaire qui aurait dépeuplé la région du terrain légitimerait, pensaient-ils, le fait qu’il devait appartenir à des Blancs possédant une morale supérieure.

🔴D’AUTRES SOURCES DU ‘MYTHE’ DE SHAKA
Paradoxalement, d’autres facteurs contradictoires ont pu influencer l’histoire de Shaka telle que nous la connaissons. Les héros mythifiés ont tendance à présenter un récit de vie similaire. Avec une illégitimité, un exil forcé et un retour au pays fait de reconquête et de règne. C’est le cas de Soundjata Keita, par exemple.

On connaît aussi Shaka pour ses qualités de guerrier et de conquérant. Elles lui ont valu le surnom de ‘Napoléon africain’. Aussi impressionnante que soient les conquêtes de Shaka, son territoire était très loin d’atteindre celui de l’empereur des Français en superficie. Les commentateurs européens étaient particulièrement enclins à affubler les conquérants africains du surnom de ‘Napoléon africain’.

Shaka n’était pas ‘un Napoléon’ mais un souverain à part entière. Il n’était pas un génocidaire même si ses conquêtes ont vraisemblablement causé directement et indirectement des guerres très meurtrières et d’importants déplacements de population en Afrique australe.

Sa transformation d’un obscur clan en ce qui sont parmi les plus fameux ethnies et royaumes africains est à mettre à son crédit. Elle contribue à garantir sa place au panthéon de l’histoire africaine, au delà de tous les mythes qui brouillent son existence.

Ijamact